Samedi 3 avril, une manifestation contre la répression policière et juridique avait lieu à Lausanne. Dans un climat particulier (évacuation douloureuse de la Zad, répression policière contre les militant.e.s interpellé.e.s à l’ombre des médias, procès juridique acquittant le policier qui a tué Hervé, violente répression face à un regroupement de soutien), la marche jusqu’à la place de la Riponne s’est déroulée dans une atmosphère électrique, au rythme des chants anti-police. Après la fin officielle de cette manifestation autorisée, un groupe d’une centaine de personnes décide de marcher vers le CHUV afin d’apporter son soutien au Zadiste tombé d’un arbre suite au comportement absolument honteux de la police vaudoise. Après plus d’une heure à marcher librement dans les rues lausannoises, à se réattribuer l’espace public et à le tatouer avec des slogans anti-flic ou en faveur de la Zad, les militant.e.s.x se sont dispersé.e.s alors qu’un processus de nassage était en cours.
*TW : nous avons reçu un message nous prévenant que ce texte avait provoqué des réactions émotives particulièrement fortes chez plusieurs personnes ayant participées à la Zad et/ou à cette manifestation sauvage. Choisissez donc bien le moment et l’endroit idéal pour le lire.
Immense amour à vous tous.tes et à tous.tes celleux qui ont rendu cette magnifique aventure possible.
A force d’être brûlées, nous devenons brûlantes.
Ce samedi, une marée de torches noires a déferlé dans les rues de Lausanne, éclaboussant de rage les rivages publicitaires et les murs de béton.
Elle a créé une brèche dans le gris ambiant, dans le refoulement permanent, dans la pondération et ses dents autoritaires. Elle a créé une brèche dans cette toile blanche de l’acceptation, du dialogue, de la soumission, du petit pas.
Le colibri est mort. Libérons le fauve.
Samedi 13h, place du Château, Lausanne. Sous un vent qui fait claquer les volets de notre cœur, nous nous sommes rassemblées. Nous sommes mille, mi-illusion, mi-espoir, mille fruits d’un militantisme mi-léopard, mi-chat noir. Sous un soleil de plomb coulant qui arme notre détermination, portées par une vive frustration, nous sommes comme un million.
L’actualité est brûlante, elle nous brûle les lèvres, elle nous brûle le cœur.
Ils ont détruit notre Zad, ils nous ont humiliées et violentées dans leur poste, ils ont exténué nos deux dernières étoiles, les ont poussés à filer contre l’horizon. Ils ont acquitté ce flic qui a buté Hervé. Ils l’ont rémunéré. Mais putain, depuis quand on récompense celui qui tue un.e Noir.e ?
Ils sont l’ennemi à abattre, la cible de nos flèches enduites de rage et d’amour, le cœur d’un monstre froid qui, plus que jamais, détient le monopole de la violence légitime.
Ils sont la police, la justice, la politique.
Ils sont la force de l’Ombre. Nous avons la force du nombre.
Soutien sans faille à ce Zadiste (et à sa compagne de fortune) que la police a précipité dans l’Inconnu. Message à la police : aucune excuse, aucun pardon. Nous ne vous tendrons jamais notre main, vous n’aurez le droit qu’à notre poing.
Le cortège défile, tel un long serpent de cendre qui glisse sur les rues lausannoises. Un parfum de vendetta coule sur la ville. Un parfum de vent d’état.
Tout le monde déteste la police.
A bas l’état, les flics et les fachos.
Féministes anticapitalistes.
Anti-anti-anticapitaliste.
La vie des Noir.e.s.x compte aussi.
En Suisse aussi, la police tue.
Mettraux démission.
Ce ne sont pas des slogans, des chansons. Ce sont des hymnes. Les hymnes d’un mouvement qui ne baissera les armes que lorsque l’ennemi baissera la tête.
Des fumigènes noirs embrasent notre balade. Le noir, celui qui ne laisse pas de place aux nuances, le noir, le brûlé, la nuit, le noir, l’espoir, le noir, cet espace où toutes les couleurs, toutes les luttes se rassemblent, s’assemblent, le noir, celui de Louise Michel et de tant d’autres, est notre visage.
La manifestation se termine. Mais nos cœurs ont encore de la lave à faire couler et nos bouches encore des nuées de cendre à recracher.
Dispersez-vous, qu’ils disent. Alors nous nous organisons.
Nous sommes plus de cent à nous diriger vers le CHUV. C’est cent existences que les déterminismes moroses de ce monde n’ont pas réussi à engloutir, c’est cent sentiers qui ont dévié à travers la forêt de mythes qui abrite les brumes hurlantes de ce monde déchu.
La police nous suit. Œil pour œil, sang pour sang.
Le sol tremble sous nos pas. Ou est-ce le ciel qui éclate enfin ?
Nous sommes un bloc, un bloc solidaire, un bloc noir. Un bloc où les luttes féministes, antiracistes, écologistes s’emmêlent, s’embrassent, baisent sur les futures tombes de ce monde.
Tout le monde déteste la police. Tout le monde déteste la police. Tout le monde déteste la police. Tout le monde déteste la police. Tout le monde déteste la police. Tout le monde déteste la police.
Voici peut-être le point d’articulation de toutes nos luttes, le noyau où elles se recoupent toutes.
La police lèche les bottes de la bourgeoisie blanche, du patriarcat, du capitalisme. Dictatrice du chaos, dictatrice du statut quo.
Elle pense pouvoir nous nasser, alors nous nous engouffrons dans un parking tel un troupeau de gazelles, avant de ressortir comme des coccinelles. Les flics ont beau déployer leurs ailes calcinées, ils nous auront pas.
Le soleil nous tend un dernier baiser.
Le souffle de révolte se dissipe.
Nous avons créé du désordre dans ce totalitarisme de l’ordre. Nous avons imposé notre temporalité, notre mobilité après que la police nous ait imposé les siennes sur la colline du Mormont. Nous avons menacé ceux qui ne cessent de nous menacer. Nous avons fait jaillir une étincelle dans les rues lausannoises. Une étincelle noire.
Le feu n’a pas pris ? Soyons-en certaines : un jour, il prendra.
Le jour ou le feu prendra, vous irez implorer la protection de la police face a la colère de la majorité silencieuse…
Il y a méprise chaton, nous sommes la majorité silencieuse en colère. Les intérêts du bien commun sont au cœur de nos mouvements … et s’il faut que le feu prenne pour qu’ils soient respectés, nous danserons de joie autour, je t’assure.
Jeanne marque les gens qui de leur nombril se targuent.
Jeanne ! Car quoi ? Bête, on nous snob, béton nous nargue
Jeanne, la com d’un n’est pas le commun, pâle com, hein?
Jeanne, toi, moi, eux sommes le phloème, nous sommes le lit, viens?
Jeanne, fière litière, altière, dans le courant de la rivière
Jeanne, avec toi, remontons le lit, tôt, si fière de la carrière