À l’occasion du 8 mars, Journée internationale pour les droits des femmexs et des luttes féministes, nous publions un discours déclaré le 14 juin 2021 à Fribourg par le GT écoféministe d’Extinction Rebellion Fribourg, invité par la Grève Féministe à participer à ce jour de grève aux côtés des écoféministes de la Grève du Climat. Il nous semble toujours autant fâcheusement d’actualité.
Loin d’être épargnés de tout rapport de domination et d’oppression, nos mouvements écolos qui se déclarent anti-autoritaires sont aussi traversés et minés par la domination masculine, le sexisme, la transphobie, l’homophobie, le validisme, le racisme et le classisme.
Nous, écoféministes d’Extinction Rebellion, nous questionnons sur l’utilisation systématique de « la » science dans nos mouvements écolos et sur la production des savoirs et leur rapport situé au monde occidental, masculin et colonial. Des sciences naturelles prétendument neutres et intouchables ! Nous refusons un discours déterministe, fataliste et dépolitisé des théories de l’effondrement. Nous cherchons à nous réapproprier nos histoires et nos modes d’être au monde, sans la préparation cynique masculiniste, militariste et fascisante à une table rase de notre terre et de notre humanité, où les plus vulnérables, les plus précaires et les plus opprimé·e·x·s sont et seront encore les premières victimes d’un système reposant déjà sur leur exploitation.
Nous avons grand besoin de « faire réseau » pour « faire des racines » et de construire des complicités militantes locales et internationales pour une véritable justice écologique et climatique décarbonée. À Fribourg, en Suisse et en Europe, entre les pays du Nord et leur dette vis-à-vis des pays du Sud, entre urbain·e·x·s aux rurales·aux. Pour créer des brèches et fissurer les frontières faites de béton, de pétrole, de métal, faites de forces de l’ordre, faites de lignes tracées à la main il y a deux ou trois siècles et faites d’imaginaires aveuglants et homogénéisants. Nous refusons un monde fait d’un seul monde unique, violent, impérialiste, capitaliste, patriarcal et industriel !
Nous dénonçons la répression policière et judiciaire des mouvements militants et des espaces autonomes qui remettent en cause l’ordre économique et social et l’état (hétéro)sexiste, capitaliste et raciste. La purple mass de vélos à Lausanne le 14 juin 2020, les colleur·euse·x·s de Lausanne et de Fribourg, les militant·e·x·s du Block Friday à Fribourg, les zadistes de la Colline du Mormont, les squats, les grévistes du climat qui faisaient appel à la grève militaire, la dernière décision du tribunal fédéral qui criminalise la désobéissance civile, la LMPT…
Nous réclamons une démocratie directe, inclusive et égalitaire dans les faits. Nous refusons un système qui repose sur un mode de pensée binaire du vote OUI-NON et sur un rapport détaché et d’exploitation de la nature. Nous réclamons une démocratie qui offre les possibilités d’une véritable communauté du vivant où touxtes peuvent cohabiter ensemble, s’exprimer et bénéficier d’une existence digne. Les assemblées citoyennes sont un premier pas vers un dialogue juste et sensible entre les êtres.
Nous faisons appel à un écoféminisme résolument radical et intersectionnel, un écoféminisme de luttes et d’actions, qui n’enferme pas les femmexs dans de nouveaux rôles prétendument écologiques et non émancipateurs. Un écoféminisme qui ne fait pas le jeu d’une mode édulcorée, d’une récupération capitaliste et d’une stratégie de communication marketing. Pas de zéro déchet sans une répartition égalitaire du travail reproductif gratuit dans les couples et familles hétéros ! Pas d’étals de librairies et de costumes de sorcières dans les supermarchés à Halloween sans des witch blocks dans les rues ! Pas de travail de care par les femmexs, personnes trans et non binaires dans nos mouvements pour organiser la logistique, accueillir les nouvelles personnes, nourrir et soigner les activistes et apaiser les conflits interpersonnels sans une prise de conscience collective interne des logiques de domination et de l’accaparement du pouvoir et de la parole ! Pas de prises de parole féminines, féministes et queer alibi et pour bonne conscience dans les mobilisations écolo sans pouvoir se retrouver dans des espaces safe et défendre la non-mixité et la mixité choisie ! Enfin nous faisons appel à la diversité de tactiques et de modes d’actions, puisque le message de l’écoféminisme est de cultiver la diversité dans l’unité. Nous appelons à créer nos actions à notre image, colorées, incarnées et selon notre propre définition de la non-violence !
ÉCOFÉMINISTES, NOUS SOMMES LÉGITIMES DE PENSER LE CHANGEMENT PARCE QUE NOS VIES VALENT PLUS QUE LEUR PROFIT !