Fin février 2024 naissait Révolte Agricole Suisse (on en parlait ici). Le ras-le-bol général, les réseaux sociaux et l’importante médiatisation avaient permis aux paysan·nes de se réunir, quand bien même les conditions de leur métier rendent toute mobilisation compliquée : le travail est nécessairement continu, les exploitations sont par nature isolées et les conditions de travail variées. Aujourd’hui, alors que les revendications principales n’ont pas encore été entendues et que le printemps arrive, se pose la question de la suite du mouvement ces prochains mois, ces prochaines années. Avec l’humilité qui sied à tout observateur extérieur n’étant pas en prise avec l’éventail (serré) des possibles, on se permet quelques réflexions.
Bilan et suite possible
En ce début de 2025, le mouvement Révolte Agricole Suisse a principalement été invité par les médias pour faire le bilan d’une année de mobilisation. Le constat est rapide : à l’exception de quelques victoires marginales (l’abandon de devoir attribuer 3,5% des terres cultivables pour la promotion de la biodiversité, les victoires face aux différentes initiatives écologistes nationales, la promesse de Parmelin de revoir les contrôles à la baisse d’ici 2026, le fait que le budget agricole n’ait pas été revu à la baisse comme initialement prévu par le Conseil fédéral, etc.), rien n’a fondamentalement changé pour le monde paysan suisse s’agissant des deux revendications centrales : la rémunération et les contraintes administratives.
Ce qui semble faire l’unanimité chez les paysan·nes, c’est l’expérience d’une nouvelle forme de solidarité. Interrogée dans le Journal du Jura, Tiffany Lecomte, représentante francophones du canton de Berne lors des discussions au Parlement explique : « Cette année nous a retourné les tripes. Même si on est dans la merde jusqu’au cou, au moins on a remarqué qu’on était tous dans le même bateau ». Dans La Gruyère, Eric Barras, paysan et député UDC dit sensiblement la même chose : « Si chacun se défend dans son coin, on ne va nulle part. Cette révolte aura au moins eu le mérite de fédérer un peu les agriculteurs, qui sont souvent individualistes. » Cette expérience de solidarité semble être plutôt de bonne augure pour la suite, comme le conclut Martin Eicher dans le Journal du Jura : « Nous allons continuer à nous serrer les coudes et à nous battre. Nous allons maintenir la pression. »
Dernière action en date, mi-février, Révolte Agricole Suisse organisait « les fourches de la colère », transformant Freddy Mercury, Charlie Chaplin ou d’autres statues en porte-paroles silencieux de la cause paysanne. L’action pourrait se résumer en quelques mots d’ordre : maintenir la pression médiatique, poursuivre la mobilisation et continuer à profiter d’une couverture journalistique plutôt favorable en imaginant des actions symboliques, bien préparées et bon enfant. C’est une ligne tactique qui a l’avantage d’être consensuelle et d’être facilement mise en place.


Un peu plus tôt dans l’année, Simon Baechler, porte-parole d’Action agricole Fribourg, donnait quant à lui un son de cloche un peu différent dans La Broye : « Il est difficile de prédire les mobilisations futures. D’un côté, le manque d’actions de la part de nos instances fédérales semble créer un effet de découragement. De l’autre, une simple prise de position peut relancer la machine. Seul l’avenir nous le dira. » La machine, on l’imagine, c’est le mouvement qui a pris spontanément il y a une année – une force, une colère, qui peut soudainement monter, déborder, avant de se retirer, à nouveau invisible. Comme une crue. Le genre de mouvement qu’on ne commande pas et qui dépasse, comme l’année passée, les initiateurs. Un mouvement dont il est difficile de savoir aujourd’hui où il en est.
Et pour quoi faire descendre dans la rue ? Plan A : Du lobbyisme, encore du lobbyisme!
En vue de quoi se mobiliser ? Les 8 points défendus par Révolte Agricole Suisse il y a une année, les 4 demandes portées par Dialog Bauern Schweiz, ou encore les deux revendications diffusées à l’occasion des « fourches de la colère » s’articulent dans une vision commune. Il s’agit au fond de mieux rémunéré le travail paysan, de moins le fliquer et d’en simplifier la teneur administrative. En revanche, ils ne disent rien du chemin pour arriver à ces fins – ils ne disent rien des personnes avec qui s’allier, de la manière avec laquelle arriver à ces changements. Ils ne disent rien de la stratégie. De notre côté, de l’extérieur, on en voit deux qui ne paraissent pas conciliables de bout en bout.
La première stratégie possible est bien connue : c’est la ligne poursuivie par l’Union Suisse des Paysans (USP) et soutenue par une élite agro-politicienne rassemblant certain·es paysan·nes possédant de grandes exploitations, des représentants des groupes pharmaceutiques ou agro-alimentaires suisses, et des élu.es des partis bourgeois. Elle consiste à accepter les règles structurelles du jeu et à négocier ce qui peut l’être en l’état. On ne change pas le mécanisme du libre-marché ni celui des paiements directs – mais on tente de défendre le budget agricole, de limiter les charges administratives, de réduire les mesures écologiques. C’est donc une stratégie qui repose essentiellement sur le lobbyisme – quitte l’accompagner par quelques manifestations médiatiques pour « maintenir la pression ».
Cette première ligne stratégique se repère très facilement dans l’espace médiatique parce qu’elle cible constamment deux groupes d’individus qu’elle juge responsables de la situation actuelle. Premièrement elle tape sur les citadin.nes et les écolos (non sans certaines raisons). Ceci pour renforcer le clivage gauche-droite. Cela permet d’identifier « les ennemis » (parfois taxés par la même occasion de « communistes ») et de renforcer l’alliance entre les paysan·nes et le bloc bourgeois (quand bien même leurs intérêts seraient divergents… mais ça chut). En somme : les ennemis de mes ennemis sont mes amis.
Deuxième cible de cette stratégie : le consommateur – à qui incombe le fameux choix et la responsabilité des produits qu’il achète. C’est la rengaine de « la liberté du consommateur ». A l’évidence, cette deuxième cible ne remplit pas la même fonction que la première. Là où l’écolo-bobo est l’ennemi, le consommateur remplit davantage une fonction de disculpation. Car c’est le consommateur qui déciderait de ses achats. Ni Coop, ni Migros, ni la politique n’y pourraient rien. On rappellera d’ailleurs que c’est là toute la beauté du geste néo-libéral, dès les années 80′ : cantonner une partie de ce qui relevait auparavant de choix politiques de société dans la seule décision du consommateur quand il est face à un étalage de supermarché. Et voilà qui explique que rien ne change depuis des années en termes de rémunération des paysan·nes quand bien même le camp bourgeois est majoritaire au Parlement (parce que ça, c’est quand même difficile à bien expliquer, non ?) : c’est le consommateur qui est le responsable.
Et on voit bien comment l’écolo-bobo et le consommateur sont deux cibles complémentaires. D’un côté, le consommateur, c’est l’explication froide et rationnel. Quand un politicien ou un·e paysan·ne parle du consommateur, c’est toujours assez calmement. C’est peut-être qu’en tapant sur un « mauvais consommateur » (= qui achète des fraises au mois de février pour les mettre dans son lait payé le moins cher possible), on risque de toucher aussi le « bon citoyen » (= dont le bulletin de vote va en faveur des paysan·nes). Car le « mauvais consommateur » et le « bon citoyen » sont souvent les deux faces d’une seule et même personne. Donc on y va mollo. Quant à l’ennemi, l’écolo-bobo, sur lui, on peut se défouler. On est sur un plan avant tout affectif. On n’a pas grand-chose à perdre avec lui – c’est un citoyen moins fidèle. Et ça fait toujours du bien de s’emporter un peu.
Bon. Soyons honnête. On pensera ce que l’on voudra du consommateur (et de l’écolo-bobo). Mais si on attend des consommateurs qu’ils changent d’eux-même leurs comportements (c’est-à-dire sans débat ni décision politique en amont) dans une sorte de révélation miraculeuse individualiste, les paysan.nes se mettent la fourche dans l’oeil – et profondément. Ils vont attendre longtemps, très longtemps. Suffisamment longtemps pour finir par devoir vendre leur exploitation à une plus grande. Et ce ne sont pas les grands distributeurs qui se plaindront de cette attente, le statu quo étant synonyme de source de profit pour eux.
Aussi, il faut le dire : à chaque fois qu’un parti, qu’une organisation syndicale paysanne, qu’un·e politicien·ne ou qu’un·e paysan·e tire à boulets rouges sur les écolos ou qu’il ou elle se cantonne à un discours stigmatisant les consommateurs, c’est cette tactique du bloc bourgeois libéral qu’il ou qu’elle utilise – consciemment ou pas. Et quant aux possibilités de changements réels avec une telle stratégie d’alliance avec les intérêts bourgeois, ces dernières décennies peuvent apporter un début de réponse… (l’image plus en-dessous aussi d’ailleurs). Dans la même veine, on parie notre palme de Colvert que l’élection du sieur Markus Ritter au Conseil fédéral, président de l’USP, n’aurait pas amélioré la vie aux petites exploitations paysannes.
Et pour quoi faire descendre dans la rue ? Plan B : Changer le système!
La deuxième stratégie possible est radicale. C’est opérer un virage à 90° alors que tout va déjà très vite – cela prendra du temps, cela nécessitera des interventions étatiques importantes, du moins dans un premier temps. Interventions d’abord pour mettre en place dans la société un vrai débat (et avec le moins possible de politicien·nes please!) susceptible de renouer le pacte social entre les villes et les campagnes : qu’est-ce que nous exigeons, en tant que société, des paysan·nes ? quel système imaginer, en tant que société, pour que les paysan·nes soient mieux rétribuer ? quelle nourriture désirons-nous, en tant que société, manger ? Et si on rappelle à chaque fois ici le « en tant que société », c’est que, précisément, c’est ce qu’il manque aujourd’hui où chaque individu est renvoyé à ses propres choix d’alimentation.
Revoir le système de redistribution actuel, faciliter structurellement les circuits courts et les petites fermes, permettre à chacun.e l’accès à une alimentation saine et locale, assurer aux paysan·nes une juste rémunération,… L’étendue des changements à opérer est vertigineuse, mais la collectivité a sans doute infiniment à y gagner d’une vraie « révolution » du système, dépassant le clivage politique traditionnel. Quand à la question de savoir si la société et son monde politique sont prêt pour cette « révolution » elle ne fait guère de sens : c’est en travaillant ensemble, en discutant, en se mobilisant que des chemins s’ouvriront. Sans mobilisation, rien ne change – alors que si tout le monde se mobilise, tout peut changer.

A l’évidence, cette deuxième ligne stratégique dessine une ligne de démarcation bien différente de la première. Il se pourrait bien que l’écolo-bobo et que le consommateur deviennent potentiellement des soutiens à cette volonté de transformation radicale. Ici les personnes et institutions antagonistes, ce sont celles et ceux qui ont des intérêts économiques à perdre. Il s’agit au fond de prendre au sérieux ce que T. Cerf, porte-parole de Migros, avait maladroitement exprimé il y a une année, quand il voulait rassurer les consommateurs sur l’utilisation que faisait Migros de leurs données. « Pour un expert de la tech’ qui serait en train de développer la consommation du futur, on doit paraître comme des guignols. On est des paysans par rapport à ce qu’on fait de ces données. »
Le temps d’une seconde, le porte-parole a déraillé de ce qui était prévu. « On est des paysans ». Il y aurait selon lui d’un côté les expert·es de la tech’ et autres personnes sérieuses qui développent la consommation du futur. Et de l’autre côté, les guignols, les paysan·nes qui… qui produisent et cultivent la consommation d’aujourd’hui. Des simples « paysans » quoi.
Et voilà qui saute aux yeux de tout le monde quand il prononce le terme « paysan ». Pour lui Tristan Cerf, mais aussi pour Migros, pour la grande distribution et pour certains milieux économiques qui prennent position et se battent non par pour le bien-être de la société, de sa population et du Vivant mais en ayant comme seule boussole le taux de profit et la rentabilité de leurs affaires,… pour toutes ces personnes, le paysan ne représente plus grand-chose de concret, juste une sorte d’injure pour dire guignol, débile, rétrograde, dépassé.
Prendre au sérieux les propos de T. C., c’est d’abord reconnaître qu’ils dessinent une ligne de front entre deux camps aux intérêts opposés. D’un côté celles et ceux qui veulent que rien ne changent et qui défendent leurs intérêts économiques (à commencer par les intérêts de la grande distribution) et de l’autre côté celles et ceux qui voudraient imaginer un autre système, plus juste, plus rémunérateur, moins suicidaire. Prendre au sérieux ces propos, c’est ensuite décider que ces institutions et personnes dont les intérêts économiques sont leur unique préoccupation et qui font tout pour empêcher le changement ne doivent pas participer à ce grand débat de société. Arrêtons de prendre leurs avis. Reléguons-les au seuil de nos échanges. Négocions d’abord entre nous, personnes habitantes et citoyennes, à partir de nos valeurs parfois différentes, et laissons Migros, Coop and Cie prendre acte et s’adapter aux décisions qui seront les nôtres.
Le cas Digiflux ou l’impasse du clivage gauche-droite
A défaut d’apporter des changements structurels, il est indéniable que la première option stratégique, celle du lobbyisme, apporte régulièrement de petites victoires pour le mouvement paysan. Fin 2024, il y en a eu encore deux. D’une part, le parlement a refusé de revoir à la baisse le budget agricole et le montant des paiements directs comme le proposait le Conseil fédéral. D’autre part, la motion parlementaire déposée par le député UDC fribourgeois Nicolas Kolly qui visait à supprimer l’obligation pour les paysan·nes d’utiliser l’application Digiflux a été acceptée au Conseil national (elle doit désormais être discutée au Conseil des Etats).
Le cas est intéressant : Digiflux est une application centralisant toute utilisation de produits phytosanitaires ou de fertilisants. Elle ressemble fortement à ces outils de « gestion » et de « contrôle » qui essaiment un peu partout dans la société dès lors qu’on « numérise ». Il était prévu que l’application, en cours d’élaboration et d’essai actuellement, devienne obligatoire pour toutes les entreprises utilisant des produits phyto. Les paysan·nes voyant Digiflux comme un nouvel obstacle administratif, c’était une de leur revendication que sa future utilisation obligatoire soit supprimée. Même Uniterre, le syndicat paysan de gauche, se positionnait contre l’obligation d’utiliser Digiflux.
Or, ce qui est remarquable dans le cas de Digiflux, c’est que toute la gauche au Conseil national a voté contre la motion de Nicolas Kolly. Parce que la motion était jugée mauvaise ? Parce qu’elle venait de la droite dure du Conseil national ? Parce qu’il s’agit de défendre l’écologie à tout prix et de faire front commun contre le bloc bourgeois ? Nous n’avons pas trouvé de réponse convaincante. En soumettant la question à un militant d’Uniterre, celui-ci n’est pas surpris. Selon lui, la gauche n’ayant pas de projet concret et réaliste pour les paysan·nes, elle est à côté de la plaque, « trop intéressée par les petits papillons, pas assez par les structures économiques. » Une politicienne verte élue au niveau cantonal et connaissant de prêt le milieu paysan nous avoue qu’il y a effectivement une tendance dans son parti à être très idéaliste et déconnecté des enjeux. Elle a pourtant l’impression que les choses sont en train de changer. Selon elle, l’une des difficultés politiques à apporter des solutions concrètes au monde paysan réside dans la polarisation du clivage gauche-droite. Un clivage dont la droite n’est pas l’unique responsable selon elle. Sur une motion comme celle de Digiflux, l’affaire est claire : la gauche elle aussi joue et performe le clivage gauche-droite. Un clivage qui assure le statu quo et se fait in fine sur le dos des paysan·nes.
Sur l’application de Digiflux, il y a encore quelque chose d’autre qui s’est peut-être aussi joué, qui relève de l’agriculture 4.0 et de sa numérisation. En agriculture, comme dans n’importe quelle entreprise ou département étatique, l’utopie d’une lisibilité totale liée à un contrôle en temps réel des datas et des flux se diffuse toujours plus largement, accompagnant les processus de numérisation. Qu’à gauche, on puisse rencontrer des thuriféraires de cette agriculture du futur, « propre », « moderne » et largement dystopique, laisse songeur. Car les contenus de telles « visions » rejoignent tout à fait les propos de Tristan Cerf. Ils n’ont rien d’émancipateurs. Ils continuent d’éloigner le paysan de la terre pour le coltiner dans un bureau. Ils continuent à le rendre toujours plus dépendant de la machinerie extérieure et plus contrôlé. Ils continuent à lui imposer une marche à suivre.
Etablir des propositions politiques sur « les structures économiques » plutôt que « sur les papillons » demandait un militant d’Uniterre… Finissons par mentionner deux initiatives intéressantes qui proviennent de la gauche et qui vont dans le bon sens. La première, c’est l’initiative parlementaire 22.477 écrite en collaboration avec Uniterre et déposée par Isabelle Pasquier-Eichenberger (avant d’être reprise par Sophie Gigon-Michaud) pour un observatoire des prix chargé de « créer de la transparence sur la formation des prix, les marges et les coûts le long des filières agroalimentaires. » A l’heure actuelle, c’est la Commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) qui fait obstacle à cette initiative.
La seconde, c’est l’initiative parlementaire 24.414 « Des prix de référence pour protéger la production agricole » déposée par le conseiller national vert vaudois Raphaël Mahaim. Le texte demande que les prix indicatifs aujourd’hui facultatifs concernant certains produits agricoles deviennent des prix de référence contraignants. Accepté par la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national (CER-N), le texte doit être analysé dans sa commission soeur au Conseil des Etats – toujours la même, que l’on devine bien noyautée par les partisans du statu quo.
Quelles actions ? Leviers économiques, politiques et médiatiques…
Jusqu’à présent les formes d’action de Révolte Agricole Suisse ont surtout visé la médiatisation, sans chercher à entrer dans un véritable rapport de force – qu’il soit médiatique ou économique. Arnaud Rochat, de la Révolte Agricole, ne disait pas tellement autre chose à Liebefeld, quand il annonçait qu’il faudrait peut-être « passer à autre chose » avant d’être acclamé par plusieurs centaines de paysan.nes. Et c’est d’ailleurs la logique même du rapport de force : discuter et négocier sans l’existence de menace concrète (qu’il s’agisse de grève, de blocages, d’actions menaçant de salir véritablement la réputation d’une grande enseigne ou d’autres choses) ou sans aucune volonté d’y recourir au besoin – ça a toutes les chances de mener à pas grand-chose et de démobiliser les personnes militantes.
Si cette année la colère paysanne a pris des formes d’action relativement inoffensives, c’est notamment du fait d’une peur qu’on entend souvent. La peur de perdre le soutien de la population. Autrement dit, des actions un peu trop offensives seraient mal vues. A première vue, on pourrait croire que ces peurs sont largement partagées. Peut-être le sont-elles. Ce qui est sûr, c’est qu’elles sont surtout rabâchées par les autorités – qu’il s’agisse de l’USP, de l’OFAG, ou des autorités cantonales. C’est par exemple le discours qu’a tenu aux paysan·nes le conseiller d’Etat fribourgeois Didier Castella il y a une année : « Il est juste d’avoir un combat, de défendre ses intérêts. Par contre, l’agriculture bénéficie d’un soutien populaire et il ne faut pas le perdre avec des actions qui seraient négatives pour l’image de l’agriculture. » Plus récemment, dans la Gruyère, le directeur d’Agri Fribourg, Frédéric Ménétrey a tenu des propos similaires en se réjouissant que « les agriculteurs n’aient pas dépassé les bornes, contrairement à ce qu’on a pu voir dans d’autres pays. » Nulle doute que « l’image de l’agriculture » n’est pas l’unique préoccupation de Didier Castella ou de Frédéric Ménétrey. Il s’agit plutôt de calmer un peu le jeu face à la force paysanne. Des paysan·nes qui n’ont pas toujours été si préoccupé·es à ne pas salir l’« image de l’agriculture »…





Un dernier article devrait paraître sur la question des paiements directs. D’ici là un groupe cherche à se lancer en soutien concret à la lutte des paysan.nes. Si tu habites par Fribourg et que tu voudrais aussi réfléchir et organiser des actions, des débats, ou autres sur le sujet, écris au Colvert à redaction@lecolvertdupeuple.ch.